Les administrateurs d’Air Mauritius enclenchent les grandes manœuvres. Plus d’un an après la mise sous administration de la compagnie nationale d’aviation, une première liste de 18 employés, des pilotes, est envoyée devant le Redundancy Board. Cela pourrait n’être que le début d’une longue liste.
Selon le site : defimedia.info, environ 1 300 emplois sont directement à risque au niveau d’Air Mauritius, et cela, même si celle-ci réussit à éviter la liquidation. « Si Air Mauritius va en liquidation, quelque 2 300 personnes perdront leur emploi. Il est estimé que si la restructuration d’Air Mauritius, ou de son business, se fait avec succès comme un tout, cela sauvera au moins 1 000 emplois ». C’est ce qu’écrivent les administrateurs, Sattar Hajee Abdoula et Arvind Singh Gokhool, dans leur dossier soumis au Redundancy Board en début de semaine pour justifier le limogeage de 18 pilotes. En d’autres mots, sur 2 300 emplois, Air Mauritius pourrait n’en conserver qu’un millier, voire un peu plus.
Dans ce dossier, qui vient justifier le limogeage de 18 pilotes, les administrateurs soulignent, une fois de plus, que la compagnie, qui a été placée sous administration volontaire le 22 avril 2020, n’est pas solvable. Par contre, ce qui est nouveau, c’est que les administrateurs ne prévoient pas de retour à la profitabilité avant plusieurs années. « Il est attendu qu’Air Mauritius continuera à faire des pertes irrécupérables pendant au moins cinq ans encore, si des changements ne sont pas apportés dans les fondamentaux de la compagnie », peut-on lire dans le dossier.
Réduire davantage la flotte
Air Mauritius a déjà allégé sa flotte avec quatre avions qui sont partis. D’autres pourraient suivre. « D’autres changements à la flotte sont en train d’être discutés. Le leasing de ces avions de la flotte existante n’est pas soutenable et même s’il a été négocié à la baisse, la taille et la composition de la flotte restent inappropriées par rapport aux opérations de la compagnie », avancent les administrateurs.
La compagnie comptait 15 avions. Parmi, quatre ont été vendus (deux A340-300 et deux A 319). Un A330-200, qui se trouve en Égypte depuis quelques semaines, devrait aussi quitter la flotte en août. L’autre A330-200 de la compagnie pourrait aussi partir d’Air Mauritius. Conserver 2 300 employés pour une flotte qui serait réduite à neuf appareils serait donc inadéquat.
« Moins d’appareils et moins de destinations veulent automatiquement dire moins d’opérations, et donc, moins de main-d’œuvre nécessaire, et cela, dans un contexte où la compagnie était déjà en surnombre d’employés », indique le document soumis au Redundancy Board.
Si Air Mauritius diminue drastiquement le nombre de destinations, c’est parce qu’elle doit repenser tout son réseau dans un monde où la Covid-19 a bouleversé l’industrie du voyage.
Puis, rappellent les administrateurs, « toutes les routes desservies par Air Mauritius avant la Covid-19 faisaient des pertes au moment où la compagnie était entrée sous administration, à l’exception de La Réunion ».
Certes, des efforts ont été consentis, mais c’est largement insuffisant pour permettre à la compagnie nationale d’aviation de redécoller sur des bases saines. Même les mesures prises pour faire des économies de Rs 1,75 milliard par an sur les dépenses liées au personnel sont insuffisantes. Tout comme le montant de leasing des avions qui est passé de USD 53,7 millions (Rs 2,3 milliards) par an au 31 mars 2020 à USD 10,7 millions (Rs 455 millions) par an au 31 mars.
Avec les réformes au niveau des salaires et autres avantages au personnel, l’enveloppe salariale est passée à Rs 1,8 milliard et sera de Rs 2,2 milliards lorsque les opérations reprendront pleinement avec l’ouverture totale des frontières le 1er octobre.
Peu de réservations
Pour les administrateurs, la situation reste extrêmement critique, malgré tous les efforts. Plusieurs nuages noirs continuent à planer sur la compagnie. Selon les prévisions de la direction, Maurice ne sera pas attractif de sitôt, même après l’ouverture totale des frontières, alors que les caisses sont déjà vides et qu’elle est en négociation avec le gouvernement pour recevoir des fonds pour pouvoir soutenir son fonctionnement.
« Avec les conditions sanitaires qui prévalent de par le monde, être loin de nos principaux marchés n’aide pas, d’autant plus que les passagers de l’Union européenne optent pour des destinations européennes à courte ou moyenne distance. La situation sanitaire dans des marchés tels que l’Afrique du Sud, La Réunion et l’Inde reste alarmante. La conséquence est que la demande de ces pays est très basse. Comme prévu, la demande pour Maurice stagne et un coup d’œil rapide au taux de remplissage confirme la tendance pour les prochains mois », constatent les administrateurs.
Puis, les Mauriciens sont eux aussi peu enclins à voyager à l’étranger. La demande est ici également très peu élevée. Pour les mois à venir, le taux de réservation de sièges dans les avions est de 20 à 50%, dépendant des destinations et des mois.
Mais, il y a pire. Le plan de pension de la compagnie est déficitaire à hauteur d’environ Rs 5 milliards. À cela, il faut ajouter des réclamations potentielles pour du ‘hedging’ sur le pétrole qui était d’environ Rs 340 millions au 31 mars dernier.
Ensuite, il y a des réclamations éventuelles pour des billets d’avion inutilisés. Il s’agit de billets achetés avant la pandémie et la fermeture des frontières mauriciennes. Le montant calculé par les administrateurs est de 79,3 millions d’euros (Rs 4 milliards). À tout ceci, il faut ajouter d’autres dettes à hauteur de Rs 6 milliards.
« Les vols ne pourront en aucun cas générer suffisamment de cash pour que la compagnie puisse honorer ses dépenses courantes et ses dettes pour les quatre prochains mois. Les opérations continueront à se faire à perte ».
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