Tahir NDIAYE, directeur général de SKY MALI : « il faut cesser de déconsidérer les réseaux domestiques africains dans nos différents pays »

Publié le 1 Fév, 2021

Le deuxième invité mensuel de Airactu-info est monsieur Tahir NDIAYE, directeur général de la compagnie nationale malienne. Un entretien à bâton rompu avec quelqu’un qui a aujourd’hui plus de 30 années d’expériences et de vécu professionnel en Afrique de l’Ouest et du Centre dans le domaine des transports aériens. L’ancien d’Air Afrique, de ASKY Airlines, de Air Sénégal SA met présentement tout son vécu et énergie au service de SKY Mali qui dit-il s’envolera dès la fin de cette pandémie de coronavirus. La vision de la compagnie, sa flotte, le développement des lignes, les partenariats sont disséqués à travers cette interview par Tahir NDIAYE. ENTRETIEN…

Airactu.info : Après quatre mois d’activités, comment se porte Sky Mali ?

Merci de votre invitation. Il faut dire que SKY MALI SA a aujourd’hui 6 mois d’existence réelle, en tant que compagnie aérienne régulière IATA depuis l’obtention de son PEA (Permis d’Explication Aérienne), et 4 mois d’activités aériennes effectives. Mon Dieu !! elle se porte bien, elle déploie son réseau et assure ses vols tels que prévus dans son plan de marche. En même temps que cette mise en opération, la compagnie continue à parfaire son organisation, à disposer d’un effectif compétent et professionnel et à affiner ses processus.

Airactu.info : Comment Sky Mali a vécu la pandémie liée au Coronavirus, a-t-elle été impactée ?

Comme tout le monde dans notre secteur aérien. SKY MALI SA a subi cette pandémie imprévue de plein fouet, bloquant subitement son processus d’établissement. Car il faut savoir que c’est en pleine période d’établissement de son AOC dans la réglementation malienne et de certification internationale OACI et IATA, que brusquement s’est abattu le COVID 19, début année 2020. Cela a figé toutes les actions, fermeture des frontières, de la navigation aérienne, arrêt d’activités des aéroports, etc… Imaginez ce que cela signifie, nous étions en plein recrutement, des pilotes, des commandants, des cadres responsables que nous avions fait venir à Bamako, bloqués des semaines, des mois dans les hôtels de Bamako. Il a fallu par exemple, illico, à la dernière minute, convoyer rapidement notre avion Boeing 737-500, de Johannesburg à Bamako, la dernière nuit de la fermeture des frontières des deux pays concernés, pour ne pas être bloqué. Il faut dire que cela n’a pas été facile, je peux vous raconter beaucoup d’anecdotes, il a fallu beaucoup de réactivité, d’anticipation et d’imagination, pour survivre et ne pas ruiner le projet.

Airactu.info : Quelles sont les mesures prises par Sky Mali pour rassurer les passagers à prendre l’avion en cette période de crise sanitaire ?

Vous savez, je suis un ancien Directeur à IATA CWA, donc très tôt, j’ai été au courant des décisions de cette organisation en parfaite corrélation avec l’OACI. Dès janvier-février 2020, mes anciens collègues m’avaient envoyé le « Traveller Health Declaration Documents – Harmonization is Needed – The Health Related Information amidst the COVID-19”, document largement confectionné et travaillé par l’OACI et IATA, qui l’ont adopté en commun, comme première réponse de l’Industrie à cet événement imprévu. Donc, dès sa phase de conception pour sa mise en œuvre, SKY MALI SA a commencé à intégrer dans ses process toutes les mesures préventives pour faire face et protéger sa clientèle future, tant au sol, dans les vols et qu’à la vente dès le départ.

Airactu.info: Pourquoi avez-vous choisi dans un premier temps en leasing le Boeing 737-500 et l’Embraer ERJ 145, pensez- vous densifier votre flotte avec également l’achat de nouveaux appareils qui seront à la possession de Sky Mali?

Non, notre premier Boeing 737-500 n’est pas en leasing, c’est une acquisition propre, intégré aux actifs de SKY MALI SA. C’est vrai, nous avons dans un premier temps, opté en leasing pour 2 ERJ 145 qui vont desservir le réseau domestique et le tout proche voisinage. Mais ceci n’est pas une option définitive, nous devons articuler le réseau domestique, le proche voisinage et le réseau africain avec des avions qui puissent optimiser une exploitation rationnelle. Et pour ce faire il faut être pragmatique, observer les trends nouveaux résultant de la configuration de l’après COVID, et continuer à ajuster la triptyque Avion-Réseau-Trafic. Nous pensons pour des raisons de performances aux ATR 72 et à d’autres appareils tout neufs.

Airactu.info : Vous vous êtes focalisés pour le moment sur la desserte domestique, est-ce le bon choix en termes de rentabilité, les billets ne sont-ils pas chers ?

Vous savez, il faut cesser de déconsidérer les réseaux domestiques africains dans nos différents pays, avec cette fatalité de non-rentabilité, comme pour laisser entendre qu’ad vitam aeternam le transport aérien domestique sera plombé, seules devront compter les relations aériennes extérieures. Non. En tous les cas, le Mali n’est pas dans ce schéma. C’est un grand pays, par l’histoire et par la géographie, et aussi, il faut le savoir, le Mali est parmi les 1ers pays africains à se doter d’une compagnie aérienne régulière nationale. Il est au centre de l’Afrique de l’Ouest, et dispose de plusieurs destinations intérieures de forts gabarits, avec des tarifs lucratifs et rémunérateurs. Nul mieux que le Mali n’a une vocation aérienne. Savez-vous que la desserte BKO-GAO-BKO est plus long que BKO-DKR-BKO, plus rémunérateur de surcroit. 4 mois d’activités déjà, et nous affichons un coefficient de remplissage de 80% en moyenne sur nos vols intérieurs. A part le Nigéria, seul le Mali avec SKY MALI SA est capable de bâtir un efficace réseau intérieur, solide, rationnel et rentable. Inch’ALLAH.

Airactu.info : Sky Mali a annoncé en 2021 de nouvelles destinations notamment dans la sous-région ouest africaine, comment comptez- vous vous positionner en tant que compagnie de référence en Afrique face à des concurrentes comme Air Sénégal, Air Côte d’Ivoire, Asky, Mauritania Airlines…… ?

Vous savez notre vision à SKY MALI SA est bien claire. Nous souhaitons, dès l’entame de notre exploitation procéder à une active coopération intelligente, avec les compagnies aériennes nationales voisines, déjà en activité sur les routes, qui sont opérées de/vers Bamako. Car il est vain, de notre point de vue, de vouloir se confronter à une compétition improductive, et cela pour tout le monde. Les réseaux exigus du Mali et de son proche voisinage, n’offrent d’autres alternatives, si ce n’est un partage de l’activité, pour plus d’efficience et d’efficacité, dans une approche win-win. J’y crois profondément, après maintenant 30 années d’expériences et de vécu professionnel dans cette région Ouest et Centre Afrique.

Les formes de ces partenariats pourront être multiples, du partage de codes, aux vols conjoints, à l’achat d’espace réciproque, ou en pool de coûts et/ou de recettes. SKY MALI chaque fois, fera ses choix, après évaluations et études minutieuses, et au mieux de ses intérêts.

Airactu.info : A quand la desserte à l’intercontinentale si nous prenons le cas de la France où il y a une forte communauté malienne. Quel type d’appareil va être utilisé sur cette ligne ?

Le Mali, tout le monde le sait, à une grande Diaspora, dispersée partout dans le monde, et surtout en Afrique. L’essence de SKY MALI SA est de suivre cette diaspora, d’aller la trouver là où elle se trouve, pour lui offrir ses services, la transporter partout. Nous allons nous déployer d’abord en Afrique, après le Moyen Orient, et bien sûr l’Europe, la France notamment et bien évidemment. Bien sûr nous envisageons de nous doter d’appareils plus gros, des Boeings 737-800 et demain des Max ou des Airbus, nous n’excluons rien. Mais toute chose en son temps.

Airactu.info : Avez-vous un partenaire stratégique, pourquoi pas une alliance comme le font les compagnies occidentales et du Golfe ?

Oui… C’est aussi une option de démarrer avec un partenaire stratégique. On en a vu des exemples. Mais ce n’est pas une voie obligée, ou unique. SKY MALI SA est encadrée depuis sa création et ses premières années d’activités par un cabinet africain, SMFI Consulting (Société de Marketing et de Finances Internationales) qui regroupe de hauts professionnels et consultants, très expérimentés dans tous les domaines de transport aérien, et très connaisseurs de l’activité aérienne dans cette région du monde. En partenariat avec les investisseurs de SKY MALI SA de Abu Dhabi, Al Sayeg Group (ASG), ils encadrent, conseillent, organisent la mise en route de ce nouveau start up. S’il faut un partenariat stratégique pour son envol mondial, ils aviseront. Chaque chose en son temps.

Airactu.info : La holding d’investissements émiratie :  AL SAYEGH GROUP (ASG) est l’actionnaire unique de SKY MALI SA, une société anonyme de droit malien. Est-ce que d’autres investisseurs sont déjà intéressés pour entrer dans le capital de la compagnie ?

Oui… Bien sûr… avec les succès que l’on observe dès ce démarrage, ils se bousculent à la porte. Mais chaque chose en son temps.

Airactu.info : Quels sont les grands projets de Sky Mali dans le futur ?

Ils sont grands, je dirai même grandioses, nombreux, inventifs, optimistes. Ces projets sont à l’image du grand Mali, MaliBa, du Nouveau Mali qui se dessine, MaliCoura. Il faudra compter avec cette compagnie qui s’envolera dès la fin de cette pandémie inattendue.

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